Comprendre le concept de « negative split » en marathon
Lorsque l’on parle de performance en course à pied, et tout particulièrement sur la distance mythique du marathon, une stratégie revient de plus en plus souvent dans les conversations entre coureurs et entraîneurs : le « negative split ». Littéralement, ce terme anglais signifie que la seconde moitié de course est courue plus rapidement que la première.
La majorité des marathoniens amateurs, souvent portés par l’excitation du départ, adoptent naturellement une allure un peu trop rapide sur les premiers kilomètres, pour ensuite subir une baisse de régime inévitable aux alentours du légendaire mur du 30e kilomètre. Pourtant, de nombreux spécialistes affirment que le negative split serait la stratégie la plus efficace pour performer le jour J. J’ai moi-même pu observer, au fil de mes reportages et de mes propres courses, à quel point cette méthode pouvait faire toute la différence.
Les avantages physiologiques du negative split
Courir un marathon en negative split ne relève pas simplement d’une prouesse mentale ou d’un excellent contrôle de soi. Il existe des arguments physiologiques solides en faveur de cette stratégie.
- Préserver ses réserves énergétiques : En partant plus lentement, le corps puise moins dans le glycogène musculaire, ce qui décale d’autant l’apparition de la fatigue métabolique.
- Réduction du risque de blessure : Une première moitié plus modérée limite les microtraumatismes musculaires et réduit la production de lactate.
- Meilleure régulation thermique : En évitant le sur-régime au début, vous préservez une température corporelle plus stable jusqu’au dernier tiers du marathon.
La physiologie du coureur est ainsi mieux respectée, favorisant une fin de course plus rapide, plus fluide, là où tant d’autres s’effondrent en marchant ou en luttant pour chaque foulée.
Les bénéfices psychologiques de cette stratégie de course
Au-delà de l’aspect purement physique, opter pour un negative split a aussi des avantages mentaux non négligeables. En effet, il est infiniment plus motivant — et rassurant — de dépasser les concurrents dans les derniers kilomètres plutôt que d’être dépassé en ayant le moral au plus bas.
Chaque dépassement agit comme un boost mental. C’est une inversion du rapport de force qui change totalement l’expérience de course :
- Sentiment de progression : Une montée en puissance maîtrisée renforce la confiance en soi tout au long de l’épreuve.
- Moins de souffrance mentale : En étant capable d’augmenter l’allure au moment le plus difficile, on évite le découragement lié à une baisse de performance.
- Une exécution gratifiante : Courir des derniers kilomètres rapides procure un sentiment d’accomplissement et de maîtrise rarement égalé.
Stratégie d’exécution d’un marathon en negative split
Mettre en œuvre cette stratégie nécessite une préparation minutieuse. Tout ne repose pas uniquement sur l’intuition le jour de la course. Voici comment je recommande de procéder.
1. Connaissance de son allure cible : Basée sur vos performances précédentes (10 km, semi-marathon), établissez un objectif réaliste. Le but est de courir la première moitié environ 1 à 2 % plus lentement que l’allure cible globale.
2. Contrôle de soi au départ : L’euphorie du moment peut saboter tout plan. Il faut se forcer à respecter l’intensité prévue, même si cela semble trop lent. Une montre GPS et un plan de course imprimé peuvent vous aider à tenir la cadence.
3. Savoir se déclencher : Le véritable défi du negative split réside dans la capacité à accélérer au bon moment, souvent après le 25e km. Votre corps doit être prêt, tout comme votre mental.
Exemples d’élites et amateurs ayant adopté cette approche
Nombreux sont les coureurs élites ayant signé leurs meilleures performances grâce au negative split. Eliud Kipchoge, recordman du monde du marathon, est un adepte incontesté de cette méthode. Lors de son marathon en moins de deux heures à Vienne, bien que réalisé dans des conditions optimales, la deuxième moitié fut courue plus rapidement que la première, avec une rigueur impressionnante.
Chez les amateurs, j’ai souvent observé que, parmi ceux qui atteignent voire surpassent leur objectif, une majorité auront couru plus vite entre les kilomètres 30 et 42 que sur les 21 premiers kilomètres. C’est révélateur. Le contraire est plus rare — ou alors, cela relève d’une mauvaise estimation du potentiel de départ.
Les erreurs à éviter avec le negative split
Cette stratégie n’est pas sans risque. Elle demande une bonne dose de rigueur et un excellent entraînement spécifique. Voici les pièges les plus courants :
- Allure trop lente au départ : Si la première moitié est courue trop en-dessous du potentiel, vous pourriez ne pas pouvoir compenser sur la seconde moitié.
- Manque de préparation progressive : Pour réussir une telle exécution, l’entraînement doit inclure des longues sorties avec finish rapide, des progressifs, et une excellente endurance de base.
- Ignorer les conditions météo : Courir en negative split par forte chaleur ou vent défavorable demande un ajustement d’allure très précis. Ne pas le faire peut être contre-productif.
Peut-on réussir son marathon sans adopter le negative split ?
Tout à fait. Certaines stratégies, comme le « even split » (courir à allure constante du début à la fin), sont également efficaces. Cependant, les études montrent que les runners adoptant un negative split ont généralement de meilleures performances moyennes. Du moins lorsqu’ils maîtrisent parfaitement cette approche.
En tant que journaliste spécialisé, je recommande d’expérimenter cette méthode d’abord sur des distances plus courtes, comme un semi-marathon, afin d’appréhender la gestion d’allure et l’impact mental. C’est un excellent terrain d’entraînement avant de l’appliquer sur marathon.
Mon expérience personnelle avec cette stratégie de course
Pour ma part, j’ai longtemps été partisan de la stratégie classique : partir à l’allure cible et résister aussi longtemps que possible. Mais au fil de mes années de pratique et d’interviews de coureurs performants, j’ai compris le potentiel immense du negative split.
Lors de mon dernier marathon, j’ai couru la première moitié en 1h43 et la seconde en 1h39. Malgré une météo humide et un parcours exigeant, cette gestion d’allure m’a permis d’aborder les derniers kilomètres avec lucidité. J’ai dépassé plusieurs dizaines de coureurs aux mollets tétanisés — et franchi la ligne d’arrivée avec le sourire.
Alors, faut-il courir un marathon en negative split ? À mes yeux — et à ceux de nombreux entraîneurs et coureurs expérimentés — il s’agit d’une des approches les plus intelligentes et gratifiantes pour optimiser ses chances de réussite sur les 42,195 km.
À très bientôt sur les sentiers, ou au détour d’un prochain marathon,
Adam